23 JUIN 2016 : Pour la première fois, un pays a quitté l’Union européenne.
“Reprendre le contrôle” un slogan de Boris JOHNSON et Nigel FARAGE.
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4 ans après le référendum, le Royaume Uni est sorti de l’Union européenne.
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Depuis le référendum, plusieurs premiers ministres se sont succédé dont 4 ont démissionné.
Le chaos politique s’est installé.
Le parti conservateur a implosé.
Le parti nationaliste s’est imposé.
Le pays a perdu sa place de 5ème puissance économique mondiale.
Le national populisme défit le pouvoir.
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“Le problème, c’est qu’on a eu une campagne populiste axée sur le “OUI” ou le “NON” et pas sur une personne ou un parti. Donc, une fois la décision prise, il est très difficile de revenir.” (Tony BLAIR)
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C’est quoi un pays qui sort de l’Europe ?
Toutes les générations partagent le même sentiment d’échec. On est loin de la promesse du BREXIT.
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Mais qu’en est-il des acteurs politiques du parti conservateur comme du parti travailliste ?
Qu’ils défendent le BREXIT ou non, partagent-ils le même constat ?
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“Qu’est-ce que le BREXIT a apporté de bien pour le pays ?”
Tony BLAIR : “ça a apporté une prise de conscience de ce que le pays doit faire pour lui-même parce que le BREXIT a rendu les choses plus difficiles. L’accent est mis sur ce qu’on est obligé de faire.
C’est un combat.
Cela a aussi accéléré le changement de gouvernement.“
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Dominic GRIEVE : “ça n’a apporté aucun avantage.
– On n’a pas été à même de réguler l’immigration.
– La pêche n’en a tiré aucun bénéfice.
– Nos échanges commerciaux ne se sont pas améliorés.
– Notre liberté de circulation a été restreinte.“
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PREMIERE GRANDE PROMESSE DU BREXIT : Sauver les pêcheurs
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Dès le début de la campagne de 2016, Nigel FARAGE est sur la Tamise pour soutenir les pêcheurs venus clamer leur volonté de sortir de l’Union européenne.
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Boris JOHNSON promet la reprise du contrôle des eaux du Royaume Uni.
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Huit ans plus tard, la déception des pêcheurs est immense.
Cabillaud et sole, les deux espèces consommées le plus par les Britanniques, ont quasiment disparu de la zone de pêche.
A Hastings (petit port de pêche), les bâteaux rentrent à vide. Ils ne sont plus que cinq bâteaux. Ils étaient quarante, huit ans plus tôt.
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En 2018, Michaël GOVE, fervent partisan du BREXIT, a été reçu par les syndicats.
Il a dit qu’il allait faire appliquer la ligne des 12 miles qui délimitent les eaux britanniques.
Mais il n’a pas tenu sa promesse.
La zone des 12 miles n’a jamais été respectée. La situation s’est aggravée avec l’augmentation des bâteaux de pêche industriels, plus de 1700 vaisseaux qui raflent tout avec leurs immenses filets de fond. La plupart sont pavillon britannique mais ils appartiennent à des sociétés néerlandaises. Ils pêchent par tous les temps, en continu.
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“L’industrie de la pêche n’a pas obtenu ce qu’on lui a laissé entendre qu’elle obtiendrait avec le BREXIT.
Cela s’explique, en partie, par son poids économique.
La pêche est un secteur très important sur le plan politique car les zones côtières constituent un réservoir de votes potentiellement décisifs.
Mais ce n’est pas un secteur très important pour l’économie britannique.
Et quand on négocie un accord commercial, on se concentre surtout sur les points importants pour l’économie du pays.” (Anand MENON – Politologue – King’s College)
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De toutes les négociations pour finaliser l’accord avec l’Europe, celles sur les zones de pêche ont été parmi les plus difficiles.
Elles auraient pu entraîner un retrait sans accord.
Une catastrophe aussi bien pour le Royaume Uni que pour l’Union européenne.
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L’accord est intervenu le 24 DECEMBRE car Boris JOHNSON a compris qu’il n’y aurait pas d’accord de commerce. Il y aurait le rétablissement immédiat, dès le 31 DECEMBRE, des tarifs douaniers, des quotas sur tous les échanges.
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La colère des pêcheurs est profonde au Royaume Uni.
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“Cela a causé la disparition de beaucoup de communautés de pêcheurs et d’entreprises de pêche. On a une histoire locale qui remonte à mille ans. C’est notre culture, notre histoire, notre tradition, notre patrimoine, notre sécurité alimentaire. C’est tous cela qui nous définit en tant que communauté de pêcheurs.”
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SECONDE PROMESSE DU BREXIT : Sauver le NHS (la sécurité sociale britannique)
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Pendant toute la campagne, le slogan de Boris JOHNSON a été :
“En votant pour le BREXIT, le Royaume Uni recevra 350 millions de pounds par semaine, qui financeront nos secteurs minoritaires, comme la santé.”
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“C’est un mensonge de dire que le ROYAUME UNI payait 350 millions de livres sterling par semaine, à l’Union européenne. Mais c’était un bon argument de campagne car, en disant 350 millions, cela obligeait l’opposition à dire : “c’est faux, ce n’est que 250 millions” ce qui semblait déjà énorme à l’électeur moyen ; ça a donc joué en faveur du BREXIT.” (Anand MENON – Politologue – King’s College)
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Depuis la promesse, pas une saison sans grève : dégradation des infrastructures, manque de financement et de personnel, stagnation des salaires.
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“Il y a des banques alimentaires dans certains hôpitaux car les salaires ne sont plus suffisants pour vivre.“
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Beaucoup d’infirmiers venaient d’Espagne, d’Italie, du Portugal, même de France. Il y avait beaucoup de postes à pourvoir car c’est un métier difficile et personne ne veut le faire.
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Depuis le BREXIT, le nombre d’infirmiers s’est réduit comme peau de chagrin.
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Pour Jane ANDERSON – Spécialiste des épidémies virales – :
“Le non respect des promesses du BREXIT produit des effets pervers qui vont bien au-delà du problème de financement du NHS.
La promesse de donner plus d’argent au NHS a été un argument décisif. Et lorsqu’une telle promesse n’est pas tenue, ça constitue une rupture très importante. Les gens se sont sentis abandonnés car cela touche au coeur même de notre capacité de prendre soin les uns des autres. Et si cette capacité se détériore, on n’est pas à la hauteur de ce qu’on espérait, cela provoque de la colère.
Il y a moins de personnel et, quand les gens sont malades, ils ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin.
Mais la vraie question de fond que cela soulève, c’est : dans quel type de société vit-on si on ne prend pas soin les uns des autres comme on estime qu’on devrait le faire ?“
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TROISIEME PROMESSE DU BREXIT : Reprendre le contrôle des frontières
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Pendant toute la campagne de 2016, Nigel FARAGE est aux avant-postes du combat contre l’immigration.
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“Reprendre le contrôle est clairement un concept populiste.
Il séduit les gens car il sous-entend que la cause de leurs problèmes économiques, sociaux et d’emplois réside dans le fait qu’ils ne sont pas maîtres de leur destin et, qu’en quittant l’Union européenne, ils auraient plus de contrôle sur leur vie et, notamment, sur l’immigration qui est un grand sujet de préoccupation.” (Dominic GRIEVE – Député conservateur)
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Pour Andy WIGMORE – bras droit de Nigel FARAGE – :
“Personne ne s’attendait au BREXIT. Cela veut dire qu’il existe une façon de monter un programme politique pour qu’il plaise aux gens et qu’ils y adhèrent.
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Prenez Marine LE PEN : qu’est-ce qui fait sa popularité ? Quand une personnalité politique est en campagne, elle relaie les mécontentements et met l’accent dessus pour que les électeurs se disent “ah oui, cette personne parle en mon nom.”
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Question à Andy WIGMORE : Vos slogans ne disaient pas la vérité mais, d’après vous, ce n’est pas grave ?
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Réponse d’Andy WIGMORE :
“C’est une campagne électorale.
Quelle que soit l’élection ou quel que soit le pays, les gens réagissent à un certain nombre de choses. Une grande partie du discours électoral n’est qu’un bruit de fond qui n’est pas pris en compte, qui n’imprime pas.
Les gens ne comprennent pas et ça ne les intéressent pas. Mais il y a une ou deux choses qui les font réagir.
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L’affiche anti-migrants de Nigel FARAGE a hystérisé le débat. L’affiche anti-migrants de Nigel Farage choque la classe politique britannique
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Beaucoup de gens étaient révoltés ; ça a réveillé les peurs de certains ; ça a renforcé leurs préjugés et ils se sont retrouvés dans ce slogan.
Est-ce que c’est bien, est-ce que c’est mal ?
C’est une campagne. Et une campagne, c’est comme une guerre : “je veux vendre mon produit le mieux possible car je veux que vous l’achetiez et, pour ça, je suis prêt à dire n’importe quoi.“
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Pour Tim BALE – Politologue – Queen’s Mary University – :
“FARAGE doit être perçu comme un politicien qui réussit mais c’est un pyromane.
En d’autres termes, il prêt à tout faire brûler pour voir le ROYAUME UNI redevenir le pays dans lequel il a grandi et qu’il aimerait peut-être retrouver avec, notamment, une souveraineté nationale absolue.
Donc, oui, FARAGE a une grande part de responsabilités dans la façon dont les choses se sont déroulées.”
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Le coeur de cible de la campagne de FARAGE était l’est agricole de l’Angleterre.
Après l’élargissement de l’Union européenne, en 2004, avec l’entrée de pays d’Europe centrale, certaines petites villes ont vu leur population doubler avec l’arrivée de travailleurs d’Europe de l’Est.
Ce sont des régions qui ont massivement voté pour la sortie du ROYAUME UNI de l’Union européenne.
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“La promesse était qu’en quittant l’Union européenne, moins d’immigrés viendraient. Mais, ce qui s’est passé, c’est que les gens en provenance d’Europe ont été remplacés par des personnes venant du sud de l’Asie et d’Afrique.
Les Britanniques continuent de refuser les emplois sous-payés que les migrants acceptent volontiers dans l’agriculture, le bâtiment, la santé.
Résultat, depuis 2021, l’immigration légale a plus que doublé. Elle est passée de 300.000 migrants légaux par an à près de 700.000, soit l’exact inverse de la promesse du BREXIT.” (Tim BALE)
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“Une combinaison de facteurs, essentiellement internationaux, a entraîné une pénurie de main d’oeuvre dans l’ensemble du monde occidental.
Le BREXIT a modifié la composition de notre immigration à un moment où nos besoins en main d’oeuvre étrangère étaient très forts.
Donc l’immigration a augmenté.” (Anand MENON – Politologue – King’s College -)
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L’augmentation du flux migratoire au ROYAUME UNI est due à un problème démographique, commun à tout le continent européen, qui n’a rien à voir avec l’appartenance à l’Union européenne.
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Or, en 8 ans, le discours des brexiters, à l’encontre des migrants, n’a pas évolué.
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Trente mille migrants illégaux ont traversé la Manche, en 2023.
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“De manière totalement cynique, je pense qu’au ROYAUME UNI comme dans toute l’Europe, les débats politiques houleux autour de l’immigration illégale, sont en partie destinés à détourner l’attention de la hausse de l’immigration légale car tous les pays sont confrontés aux mêmes problèmes de main d’oeuvre et aucun gouvernement, excepté, peut-être, l’ALLEMAGNE, n’a de discours honnête à ce sujet.“
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QUATRIEME PROMESSE DU BREXIT : Restaurer la souveraineté
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Une idée portée par le rêve d’un nouveau commonwealth (global britain).
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Un ROYAUME UNI émancipé du marché commun, délivré de toute contrainte européenne, capable de commercer sans entrave avec les partenaires historiques de l’empire colonial et avec le reste du monde.
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“Je trouve cette idée curieuse de vouloir lancer un programme commercial comme “global britain” en nous retirant de l’alliance qui est à notre porte, à savoir l’Union européenne ; vouloir remplacer nos partenaires commerciaux européens par des pays situés à des milliers de km.
Bien sûr qu’il est important de commercer avec ces pays mais les gains sont très faibles.
On nous avait promis un accord commercial avec les USA ; on nous avait dit qu’il serait facile à obtenir.
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Non seulement cet accord n’existe toujours pas mais, 8 ans après le BREXIT, il n’est même plus en négociation.” (Tony BLAIR)
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Derrière ce modèle de dérégulation à l’américaine, une poignée de financiers et d’ultra libéraux qui rêvent de puissance et de grandeur.
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Leur référent s’appelle SINGAPOUR, une ancienne colonie britannique devenue paradis fiscal.
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LONDRES, allias SINGAPOUR-sur-TAMISE, capitale d’un nouveau monde souverain où régnerait la finance sans contrôle.
Mais, depuis, le monde à changé.
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“Au cours des sept dernières années, le ROYAUME UNI a découvert que la souveraineté absolue n’existait pas.
Un pays qui ne fait pas partie du bloc économique et commercial, constitué par ses principaux voisins, a encore moins de souveraineté que lorsqu’il en faisait partie car, lorsqu’on veut conclure des accords de libre échange ou établir des réglementations, on constate que le ROYAUME UNI n’a pas assez de poids pour imposer des règles que les autres accepteront afin de négocier des accords de libre échange réellement bénéfiques.
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On se retrouve à devoir accepter des réglementations, des accords et des normes établies par des partenaires plus importants. C’est une découverte qui ne fait pas plaisir. Et je suis sûr qu’on n’est pas encore au bout de nos surprises.
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Donc, l’idée qu’on allait avoir plus de marge de manoeuvre pour agir s’est révélée fausse.” (Lord Peter Ricketts – Diplomate – Conseiller à la sûreté nationale)
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Aucune des promesses du BREXIT ne s’est concrétisée.